Le petit écran encourage une attention picoreuse et velléitaire. Le tactile s’y mêle au visuel, on ne contemple pas l’image, on la tient au bout de ses doigts ; on pianote à la recherche (utopique) d’un programme plein, sans temps morts ni « tunnels ». La télécommande est-elle l’outil-symptôme d’un individualisme exacerbé, ou l’accès du téléspectateur au pouvoir éditorial et le premier degré d’une naissante interactivité ? Ton monde n’est pas le mien, dit le zappeur, tu m’embêtes ! (…) Démocratique par excellence, ce geste privilégie l’échantillon, le micro et la forme clip, soit le triomphe d’une certaine télé : celle qui ne développe rien, et parle à peine, qui préfère le massage au message, qui affirme « sans transition » le choc visuel et le rythme, le pur brassage d’étincelles. La menace du zapping pèse à l’écran sur chaque énonciateur, qui doit prévenir l’ennui du téléspectateur moyen en autozappant son discours ou ses images. (Daniel Bougnoux).